La question revient souvent : dans quels secteurs investir au Togo pour garantir le succès financier ? Gerry Taama, figure emblématique de l’opposition togolaise, entrepreneur aguerri, et député, offre une réponse qui va au-delà des simples choix de secteurs. Selon lui, la réussite dépend davantage de l’entrepreneur que du secteur lui-même.
Gerry Taama rejette l’idée selon laquelle il existe des secteurs intrinsèquement bons ou mauvais. Pour lui, tout se résume à la compétence de l’entrepreneur. Il déconseille de considérer l’entrepreneuriat comme une spéculation boursière, encourageant plutôt à être un entrepreneur compétent, capable de faire prospérer n’importe quel secteur.
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L’expérience personnelle au cœur des enseignements
C’est une question qui me revient souvent. Honorable, vous écrivez beaucoup sur l’entrepreneuriat au Togo, dites-nous les secteurs où on peut investir notre argent. Quels sont les business qui marchent ?
La réponse est très simple. Il n’y a pas de bon ou de mauvais business, il y’a seulement de bons ou de mauvais entrepreneurs. C’est tout.
Certains envisagent l’entrepreneuriat comme une spéculation boursière. Si vous voulez placer votre argent et il va travailler tout seul, faites des Dat (dépôt à terme) en banque, de l’assurance vie, achetez des actions en bourse ou achetez des terrains (mais attention aux arnaques), l’immobilier est aussi un secteur refuge mais j’en ai déjà parlé ici. Ce que les gens n’ont pas compris de mon propos, c’est que je ne dis pas que ce n’est pas bon de construire, la valeur de la maison augmente toutes les années, mais si vous voulez en faire une source de revenue, c’est compliqué. Une maison que vous construisez en 2023 peut doubler de valeur en 2033, mais c’est si difficile de vendre les maisons à bon prix à Lomé. Les terrains c’est mieux, mais c’est un secteur pourri. Les palais de justice sont saturés de contentieux sur les double et triple ventes.
Pour revenir au secteur qui marche, tout dépend de l’entrepreneur. En 2011, j’ouvre Jaguar sécurity, société de fourniture d’équipements pour la protection des personnes et des biens, à Agoè. En une année, je gagne suffisamment de marchés pour déménager sur le boulevard circulaire, avec des charges qui frôlent le million par mois. En 2012, les affaires marchent bien, je suis prestataire de plusieurs banques et grandes sociétés. L’argent rentre, j’ai des marchés de plus de 100 millions de francs. Je suis grisé et je décide de rentrer en politique. Énorme erreur. Au Togo, politique et business ne marchent pas ensemble, surtout quand tu rejoins les rangs de l’opposition. Déjà en 2012, j’étais membre de la coalition arc-en-ciel.
Je perds les marchés assez rapidement, mon chiffre d’affaires s’effondre et je retourne à Agoè en 2014. Je survis en créant des sociétés non associées à mon nom et en poursuivant des missions de consultant.
2019, je crée Jupiter international, qui reprend les mêmes prestations que Jaguar sécurity, sans le gardiennage mais avec des services plus avancés. Mais un député ne peut pas diriger une entreprise privée et j’y mets du personnel. Flop total. Absence de rigueur, manque d’implication et de professionnalisme.
Si vous voulez réussir en affaires quand vous dirigez une petite entreprise, il faut être le planton, le secrétaire, le directeur commercial en même temps et le dg. Vous êtes le visage de votre entreprise. Et pour être honnête, il y’a énormément d’opportunités au Togo, la preuve, beaucoup d’étrangers réussissent chez nous. En vérité, beaucoup de Togolais réussissent aussi, mais ils préfèrent l’ombre à la lumière, pour se protéger. Tous ceux qui crient sur les réseaux sociaux qu’ils sont des entrepreneurs, sont des charlatans. À commencer par mo- même ici. Les vrais entrepreneurs qui réussissent s’invibilisent. Et c’est dommage.
J’ai été un très bon entrepreneur entre 2010 et 2012, après la politique a tout gâté. Mais je peux tout recommencer demain et avoir les mêmes résultats.
Voilà, j’espère avoir répondu aux questions de ceux qui veulent savoir dans quel secteur investir. Si j’ai le temps, je vais reprendre les publications sur les domaines qui peuvent marcher. Je précise bien qui peuvent parce qu’en entrepreneuriat, ce n’est pas sorcier. Quelqu’un fait pour lui ça marche et tu viens l’imiter et tu te casses la gueule. Vous n’abordez pas les enjeux de la même façon. Bref, j’écris trop. Qui va lire tout ça même ?
Dites-moi ce que vous en pensez. La seule différence entre moi et certains entrepreneurs, c’est que je ne parle souvent que de mes expériences donc je sais de quoi je parle.
Cherchons l’argent. Honnêtement et vivants.
Gerry Taama
Taama réitère que la réussite en affaires nécessite rigueur, implication et professionnalisme. Il souligne l’abondance d’opportunités au Togo, citant des étrangers prospères dans le pays. Il appelle à la discrétion des entrepreneurs togolais qui réussissent, soulignant que la vraie réussite parfois s’observe dans l’ombre.
Steven Wilson